Combattre la corruption à Madagascar

Jusqu’aux élections d’octobre-décembre 2013, dont les résultats ont été confirmés par la Cour Electorale Spéciale en Janvier 2014, Madagascar traversait depuis cinq ans une crise politique, pendant laquelle le gouvernement issu d’un coup d’État se révéla incapable de mettre un terme à la corruption rampante. Le pays a perdu quatre points sur l’Indice de perception de la corruption de Transparency International, passant de 32 en 2012 à 28 en 2014.

Florent Andriamahavonjy, directeur exécutif de Transparency International – Initiative Madagascar (TI-IM), nous décrit cette période et la manière dont les centres d’assistance juridique de la section ont permis d’endiguer la montée de la corruption. Pour voir Florent au travail, diffusant des informations sur la façon de lutter contre l’abus de pouvoir et la corruption, regardez notre documentaire en ligne Voix d’Afrique contre la corruption.

En 2010, TI-IM a mis en place un Centre d’assistance juridique et d’action citoyenne (CAJAC) dans le but d’apporter un soutien gratuit aux témoins et aux victimes de corruption. Comment ce centre a-t-il continué de fonctionner au cours de cette période tumultueuse ?

Entre 2009 et le début de 2014, la situation a été vraiment très difficile. Le gouvernement intérimaire n’avait aucun pouvoir légitime et nous n’avions aucun responsable élu : le président, les députés, les sénateurs, même les maires n’étaient pas des élus. L’abus de pouvoir et la corruption étaient donc en hausse. En conséquence, au sein de l’administration, la situation s’est détériorée et dans certaines régions, par exemple, les gens ont pris l’habitude d’apporter des cadeaux quand ils demandaient un service public ou tout simplement pour payer des services qui auraient dû être gratuits.

Florent et l’équipe

Florent et l’équipe

Le travail de notre CAJAC a commencé en 2010, en plein dans cette période politique difficile. Nous ne pouvions pas compter sur le gouvernement central, donc nous avons fait un choix : nous avons commencé à travailler délibérément avec le gouvernement local décentralisé, et c’est la raison pour laquelle nous collaborons aujourd’hui de manière étroite avec les municipalités. Nous voulions nous assurer que notre assistance juridique gratuite serait accessible aux groupes défavorisés. Nous avons commencé par la population des bidonvilles d’Antananarivo [la capitale de Madagascar] et plus tard, nous sommes allés dans les zones rurales, en particulier les régions éloignées, afin de sensibiliser les gens aux différentes formes de corruption, à son impact et au mal qu’elle fait. Nous avons également souligné à quel point il était important de signaler la corruption par le biais du CAJAC.

Pour en savoir plus sur nos Centres d’assistance juridique et d’action citoyenne en Afrique, regardez la bande-annonce de notre documentaire Voix d’Afrique contre la corruption.

Comment le CAJAC fonctionne-t-il ?

Nous avons plusieurs options : tout d’abord, la ligne d’assistance téléphonique gratuite que les gens peuvent appeler pour signaler des actes de corruption. Mais le problème tient au fait que tout le monde à Madagascar n’utilise pas le même réseau mobile. Pour surmonter ce problème, nous avons mis en place ce que nous appelons le CAJAC mobile. Il s’agit d’une équipe d’avocats qui se rend aux endroits où vivent les gens, afin que ces derniers n’aient pas à faire le déplacement vers nos bureaux. Madagascar est un grand pays d’une superficie de près de 600 000 kilomètres carrés. Le CAJAC mobile nous permet de sensibiliser des personnes dans des zones rurales isolées et éloignées.

TI-IM aide cette famille à préparer leur dossier pour le bureau national anti-corruption

TI-IM aide cette famille à préparer leur dossier pour le bureau national anti-corruption

La seconde innovation concerne le CAJAC « en direct » – en direct, car nous travaillons avec une station de radio locale. Nous préparons un programme radio d’une heure avec notre équipe juridique sur un thème particulier ou sur la lutte contre la corruption en général. Les auditeurs peuvent donc recevoir des conseils ou signaler des cas d’abus de pouvoir, d’abus de confiance ou de corruption. L’avantage du CAJAC en direct est que, si une personne pose une question, 100 ou 200 auditeurs profitent de la réponse. Quand il s’agit de plaintes pour abus de pouvoir et pour corruption, nous avons constaté que le CAJAC en direct a un impact positif sur les autorités locales de la région concernée.

Le « CAJAC en direct » travaille en collaboration avec une radio locale

Le « CAJAC en direct » travaille en collaboration avec une radio locale

De quelle manière le CAJAC a-t-il combattu la corruption à Madagascar au cours de ces cinq dernières années ?

Madagascar a passé le cap de cette situation politique difficile, mais la corruption est très répandue à cause d’une perte de confiance du public dans l’administration. Aujourd’hui, lorsque nous organisons des événements de sensibilisation, nous ne disons plus directement que nous luttons contre la corruption, mais que nous sommes dans un endroit donné pour aider les personnes qui s’y trouvent à connaître leurs droits. Une fois que l’on connaît ses droits, si l’on est confronté à des abus de pouvoir ou à la corruption, on peut rétorquer que ce n’est pas juste ni légal. Si une personne, ou deux, trois, quatre, cinq, si un millier de personnes revendiquent leurs droits et s’élèvent contre l’injustice, alors je suis sûr que nous pouvons faire la différence.

Lisez cette article en anglais ici.

Carousel image: Transparency International

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